An 445
Ce matin d’automne, une tempête balayait les territoires longtemps inconnus d’au-delà du Mur, le vent faisant claquer les tentes faîtes de peaux d’animaux sauvages et de fourrures de mammouths. Des hommes dont l’expérience avait marqué leurs visages de cicatrices aiguisaient leurs haches et découpaient leurs flèches. Les femmes, toutes aussi guerrières, dépeçaient des animaux, nourrissant leur enfants de chair crue. « Mais comment allons-nous traverser ? Si ce n’est pas les Corbeaux, ce seront les Baratheon qui nous anéantiront ! » La voix venait de la plus grande tente, au milieu du village improvisé. Celle-ci était chauffée au feu alimenté par des femmes, et illuminée de chandelles se regroupant autour d’une vieille carte craquelée par le froid. « Ne t’en fait pas, Xaegor, tout est planifié. » Ces paroles venaient de l’homme dans l’ombre, assis dans sa chaise de bois et de fourrures généreuses. Sa voix était grave, profonde, mais lorsqu’il s’avança, un sourire abordait ses lèvres sèches. Il avait les cheveux bruns foncés, tombant sur ses épaules recouvertes d’habits chauds, des yeux noirs de jais et un visage balafré de cicatrices. Bien qu’il n’avait que trente-deux ans, c’était un guerrier expérimenté, qui avait tué autant de marcheurs blancs qu’égorgé des sauvages, lui valant la réputation de celui qui n’a jamais été vaincu. Son nom était Magnar. Le Roi d’Au-Delà du Mur.

« Je ne veux pas remettre en question vos batailles toutes vaincues, mais sera-t-il possible de vaincre le Roi de Westeros. Quel est son nom, déjà ? » Le guerrier s’approcha de la carte. « Rodrik Baratheon. Je crains que ceux qui nous donneront le plus de mal seront les Lannisters, mon ami. Mais j’ai un plan, je te l’ai dit. Tu partiras ce soir même. Tu diras que tu veux simplement discuter avec leur chef. Si ils en ont un. Promets-leur… » Magnar s’arrêta. « Qui ? Promettre quoi ? » questionna Xaegor, un guerrier tout aussi réputé que son roi. « Les Autres. Promets-leur de la chair fraiche. En quantité. »


An 446
« Mes Frères ; À l’attaque ! » hurla le Lord Commandant. À cet instant, exactement trois-cent-soixante-deux Frères de la Garde de Nuit commencèrent à hurler, retirant leurs épées de leurs fourreaux, et se lançant à l’attaque. Au même moment, cinquante-six archers tirèrent leurs premières flèches vers la masse vivante de sauvages qui déferlait à l’horizon de Châteaunoir. Ces sauvages venaient par centaines, accompagnés de géants montés sur des mammouths et d’autres créatures inimaginables. Lord Commandant attaquait deux guerriers en même temps, ce qui était à peu près le cas de chaque Frère Juré. Rapidement, les premiers cadavres s’étendaient au sol, transformant la neige blanche en une marée rouge. Les cris résonnèrent à l’horizon, mais personne ne pouvait les entendre : Le plus proche village se trouvait à des dizaines de miles. Les Corbeaux tombèrent un par un, mais la plupart se battaient encore. Les pertes étaient nombreuses, tout comme le courage de ces hommes. Lorsque soudain, la bataille semblait gagnée, des Frères commencèrent à tomber. De plus en plus mourraient, d’autres fuyaient n’importe où, mais tous pointaient vers une direction. C’est à cet instant que le lord Commandant les vit. Ils étaient également des dizaines et des dizaines, montés sur des chevaux de glace. Ils avaient la peau blanche comme la neige et les yeux bleus comme la glace la plus froide. Les Autres. S’emparant d’une torche enflammée, criant à ses hommes de faire de même, lord Commandant parvint à brûler quelques unes de ces bêtes longtemps oubliées. Soudain, toutes les lumières s’éteignirent en même temps. Et un par un, les hommes moururent.

Dans la nuit éternelle, qu’une seule lueur de vie : Un corbeau blanc, transportant les derniers mots du Mestre du Mur. « Armée non estimable. Géants, mammouths, ours et sauvageons. Ils sont revenus. Les Autres. Châteaunoir est tombé. » Et en guise de sceau, non pas l’étampe d’encre noir de l’endroit. Seulement quelques goutes de sang.


An 464
Cela fait exactement dix-neuf ans que le Mur est tombé. Le Roi Magnar a réussi, avec son armée, d’atteindre Port-Réal, décimant toutes les armées sur son passage, réduisant même en cendres celles des Lannisters et des Tyrells. Le neuf-cent-quatrième jour du règne du roi Baratheon fut son dernier, l’homme de cinquante-six ans ne survécu pas à la bataille qui marqua la prise de Port-Réal par Magnar, alors que l’hiver battait toujours son plein. Le nouveau roi instaura plusieurs nouvelles lois. Maintenant, chaque homme pouvait fréquenter ouvertement plusieurs femmes, sans aucune atteinte à son honneur ou à son titre. L’esclavage était permis chez les nobles, mais seules certaines personnes avaient le droit de vendre des êtres humains considérés comme plus faibles ou pauvres. Bien sûr, aucun des esclaves n’avait le droit de manier une arme pour éviter les rébellions. Les sauvages devaient être considérés comme nobles et hommes de confiance, les taxes montaient, et si quelqu’un désobéissait… Magnar tiendrait sa promesse. Il y aura de la chair fraîche.